Ma réponse concernant les menaces de plainte de Frédéric Charpié

Le 6 octobre 2013, Fédéric Charpié, secrétaire national de La Gauche, m’invective sur facebook à propos d’une indemnité sur laquelle je me suis expliquée. Il affirmera quelques jours plus tard se désintéresser de cette affaire (« vos pirouettes ne m’intéressent pas tellement, pas plus que vos histoires d’indemnités d’ailleurs… »). Ainsi, les motivations qui sous-tendent sa démarche apparaissent comme évidentes. Il s’agit principalement de provocation et de récupération politique dans le cadre de la campagne pour la votation du 24 novembre sur l’avenir institutionnel du Jura bernois ; et accessoirement aussi d’une énième attaque contre des élues et élus UDC. Ce fer de lance du séparatisme de la gauche de la gauche n’en était pas à sa première attaque contre certains de mes proches ou contre moi. Par exemple, qualifier d’ « élucubrations sauvages » le discours très structuré et factuel que j’ai prononcé devant le Grand Conseil bernois l’hiver dernier ne témoigne certes pas d’un respect avéré de l’adversaire politique. Jusqu’à aujourd’hui, je n’ai jamais réagi. Mais l’intensification de l’acharnement des séparatistes sur plusieurs personnes m’a poussée à répondre. Souhaitant sortir du cadre du débat politique, Monsieur Charpié menace de déposer plainte contre moi pour calomnie si je ne m’excuse pas pour ce passage de ma réponse : « Et que dire de vos accointances avec l’extrême-gauche européenne qui n’a jamais vraiment répudié le matérialisme des marxistes dont la version concrète a fait plus de 60 millions de victimes. Quant à moi, je déteste autant le nazisme que le marxisme-léninisme, ces totalitarismes qui sont la négation même de la dignité et de la liberté humaines. »

Les menaces de plainte pénale de Monsieur Charpié appellent de ma part les commentaires suivants :

1. Tout d’abord, je m’étonne que Monsieur Charpié s’offusque de ma réponse à son attaque sur facebook alors qu’il tient les propos suivants s’agissant de nos autorités fédérales les plus hautes :

F. Charpié sur facebook à propos de :

Simonetta Sommaruga :
« nous avions prévenu qu’avec une conseillère fédérale socialiste faisant le boulot de la droite néo-fasciste (…) ».
« Berset – Sommaruga, STOP ! Après la victoire de Simonetta Sommaruga dans les urnes pour resserrer la vis de ces centaines de millions de très vilains réfugiés venus égorger nos femmes et nos enfants, nous vendre de la drogue et nous prendre notre travail, voici que débarque son homologue Alain Berset, qui avant de lutter contre la caisse unique, nous sort en guise d’échauffement son catalogue de mesures d’économie pour l’AVS. Tout ceci peut sans doute séduire sans problème le plus attardé UDC blochérien avec des tendances néo-libérales. Mais l’on peut se demander comment la base du PSS peut encore s’accommoder de voir faire ces deux Conseillers nationaux (vous lirez « fédéraux »…) sans avoir la nausée, et surtout de se demander si il n’est pas grand temps de retirer ces deux pots de vaseline du CF, soit cette véritable paire d’abrutis cupides qui ne fait que donner caution aux pires politiques xénophobes et libérales dans notre pays !!! »

Alain Berset :
« J’ai aussi vu récemment une nouvelle trace du « caractère à Alain Berset », un homme hautain, menteur, et qui a toujours raison, un homme qui préfère choisir la voie officielle du piratage de son compte Twitter plutôt que d’avouer avoir commis une simple bourde. Ce dernier point n’est pas si grave, mais il démontre pourtant la fourberie d’un homme ne se souvenant plus si il avait signé l’initiative pour la caisse unique, et aussi la cupidité de certains médias qui ont avalé cette couleuvre (…) ».

Ueli Maurer.
« En Suisse, que tous les abrutis se rassurent, car eux aussi peuvent devenir un jour président de la Confédération ! »
« Ueli Maurer totalement à la rue sur le massacre de Tienanmen, on pouvais s’attendre au pire avec cet homme à la tête de la Confédération, et bien c’est fait. Quelle honte d’avoir pu nommer un tel individu dépourvu de cervelle à ce poste là ! »

Christophe Darbellay :
« Christophe Darbellay, le grand dadet du PDC est aussi un grand malhonnête, et prêt à tout pour faire progresser son parti sur la voie sécuritaire, y compris si il faut se moquer de ses propres amis lors d’un congrès, en espérant que (…) ».

Oskar Freysinger :
Cet homme qui « participe volontiers à des rencontres fascistes internationales (…) ».

Les Conseillers fédéraux :
« Depuis le temps que je dénonce les incapables qui nous servent de Conseillers fédéraux, je dois vous avouer que pour en mettre quelques uns « en situation », je suis pour élargir encore un peu le cercle et priver de piscine tous les politiciens qui se disent notamment socialistes et (…) ».

2. Outre que je m’étonne qu’un homme qui ose recourir à un tel langage veuille porter plainte contre moi, je note qu’au travers des extraits précités Monsieur Charpié se distancie clairement de la gauche social-démocrate. Considérer que la Conseillère fédérale Simonetta Sommaruga fait « le boulot de la droite néo-fasciste » fait davantage penser à un discours d’extrême-gauche qu’à des postures de type blairiste ! Je relève au passage que Frédéric Charpié considère l’UDC, le parti auquel j’appartiens, comme néo-fasciste !!! Me concernant, cette accusation est absolument inadmissible !!! J’ai consacré ma thèse de doctorat à la philosophie politique et à la pensée européenne de Denis de Rougemont parce que, comme lui, je suis profondément attachée à la démocratie libérale fondée sur le respect de la dignité et de la liberté humaines. De plus, l’UDC, et donc les membres de l’UDC du Jura bernois et moi-même, serions des « ploutocrates haineux ». J’ai vraiment de la peine à me reconnaître dans ce qualificatif. Revenons aux orientations politiques de Frédéric Charpié. Aucune personne dotée de bon sens et d’une culture politique minimale ne niera que Monsieur Charpié appartient à l’extrême-gauche. Ce matin encore, en écoutant le bulletin d’information de 11h de la Radio Suisse romande, nous pouvions entendre que « l’extrême-gauche » ne présentera pas de candidat au deuxième tour des élections pour le Conseil d’Etat genevois. Pourrait-on pour autant lui intenter un procès en diffamation ou en calomnie ?

S’agissant maintenant des références idéologiques de l’extrême-gauche, je ne vois pas en quoi il serait pénalement répréhensible de dire qu’elle n’a pas vraiment rompu avec le matérialisme des marxistes. Et si, contrairement à mon attente, c’était le cas, qu’elle le fasse savoir publiquement. Je concède aussi qu’il est possible que Frédéric Charpié ne se reconnaisse pas dans le marxisme-léninisme ou dans le communisme en général et qu’il se réclame au contraire d’une espèce de libertarisme de gauche proche de l’anarchisme de Bakounine. Mais alors qu’il le dise aussi clairement ! De surcroît, je prends la liberté de rappeler que Lénine – l’un des trois plus célèbres marxistes totalitaires – a écrit une théorie du dépérissement de l’Etat que ne renieraient pas certains anarchistes.

L’extrême-gauche ne met-elle pas l’accent principalement sur la lutte contre le capitalisme ? Ne présente-t-elle pas les rapports de domination dans l’économie entre une catégorie qui possède le capital et une autre, opprimée – dont la force de travail est exploitée par la première –, comme la source de la plupart des problèmes ? Au travers de Monsieur Charpié notamment, ne cherche-t-elle pas à disqualifier constamment la gauche sociale-démocrate attachée à l’Etat-providence mais aussi aux fondements de la démocratie classique ? Qu’elle l’admette ou pas, l’extrême-gauche se définit essentiellement comme une idéologie matérialiste anti-capitaliste. Ajoutons aussi que Monsieur Charpié se réclame aussi de l’utopie. C’est son droit le plus strict et cela procède probablement, comme chez beaucoup d’utopistes, d’un refus de l’existant.
Mais il faut bien savoir que les utopies, autrement dit la croyance dans une espèce de monde totalement différent de ce qu’il est ici-bas ou dans une sorte de « paradis sur terre », conduisent très souvent au totalitarisme comme l’histoire l’a abondamment montré.

Quant aux 60 millions de victimes du communisme, je persiste pour dire qu’elles sont imputables à l’idéologie marxiste-léniniste. Mais j’ajoute aussitôt que les 50 millions de morts provoquées par la deuxième guerre mondiale et la Shoah sont aussi imputables à l’idéologie totalitaire et inadmissible qu’est le nazisme.

3. Si la plainte dont me menace Frédéric Charpié devait être considérée comme recevable, cela signifierait la fin des libertés de pensée, d’opinion et d’expression en Suisse. Mais aussi la fin de la liberté académique qui forme la base d’une recherche et d’un enseignement libres et encadrés essentiellement par la conscience professionnelle, la rigueur scientifique et le devoir d’objectivité. En d’autres termes, un professeur d’Université ne pourrait plus écrire que l’extrême-gauche n’a pas rompu avec le matérialisme marxiste.

En conclusion, je voudrais dire ceci à Monsieur Charpié. Vous qui traitez la formation politique à laquelle j’appartiens de « néo-fasciste », vous aurez remarqué que je ne vous ai jamais traité de marxiste ou de communiste ! J’ai uniquement évoqué « vos accointances » avec l’extrême-gauche européenne. J’ai ajouté que cette dernière n’avait « jamais vraiment répudié le matérialisme des marxistes ». Et j’ai ensuite précisé que cette idéologie dans sa version concrète avait fait plus de 60 millions de victimes. Etant profondément attachée aux libertés individuelles classiques qui trouvent leur origine matricielle dans la liberté de conscience et de croyance, j’ai cru bon d’ajouter que je détestais « autant le nazisme que le marxisme-léninisme, ces totalitarismes qui sont la négation même de la dignité et de la liberté humaines. »

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